L’étranger
Albert Camus
Première publication en 1942
184 pages
D'autres titres :
La peste
Quatrième de couverture :
"Quand la sonnerie a encore retenti, que la porte du box s'est ouverte, c'est le silence de la salle qui est monté vers moi, le silence, et cette singulière sensation que j'ai eue lorsque j'ai constaté que le jeune journaliste avait détourné les yeux. Je n'ai pas regardé du côté de Marie. Je n'en ai pas eu le temps parce que le président m'a dit dans une forme bizarre que j'aurais la tête tranchée sur une place publique au nom du peuple français..."
Conseillé à de nombreuses reprises par mon professeur de philosophie en terminal, ce livre aurait cependant pu dormir encore longtemps dans ma PAL (j’avoue que Camus ne m’attirait pas plus que ça…) si une lecture commune sur Livraddict ne m’avait pas poussée à entamer la lecture de ce petit roman.
Ce livre est divisé en deux parties. Dans la première, Meursault, le personnage principal, apprend le décès de sa mère par télégramme et se rend à son enterrement. Nous suivons donc les actions de ce personnage, des actions qu’il raconte lui-même de façon détachée de même que ses envies et son ennui, qui apparaît d’ailleurs de façon récurrente tout au long de l’ouvrage. Il rencontre Raymond Sintès qui lui raconte ses déboires amoureux et lui demande conseil sur la manière de punir sa maîtresse. Celui-ci opte finalement pour un lynchage en règle et s’en tire avec un simple avertissement.
Un peu plus tard, il invite Meursault et son amie Marie chez un ami, près de la plage. Là-bas, ils se trouvent face à face avec le frère de la femme battue par Raymond, accompagné de ses amis. Après une violente dispute, Raymond est blessé et conduit chez le médecin. Un peu plus tard, Meursault retourne sur la plage pour se détendre et, éblouit par le soleil et la lumière émise par le poignard du frère de la jeune fille, tire plusieurs fois sur celui-ci.
Dans la deuxième partie du roman, Meursault est en prison et subit plusieurs interrogatoires visant à comprendre les raisons de son acte. A l’issue d’une parodie de procès, il est finalement condamné à être décapité « au nom du peuple français ».
L’ambiance que Camus met en place, et ce dès le début du roman, m’a rappelé par certains côtés Boris Vian, notamment dans le malaise que ressent le lecteur à ne pas comprendre ni les tribulations du personnage principal ni ce par quoi il est porté. Le titre de cet ouvrage prend tout son sens très rapidement : Meursault est étranger au monde qui l’entoure – et c’est d’ailleurs l’une des choses dont il est accusé dans la deuxième partie – et semble même parfois être étranger à lui-même.
Ce qui interpelle le lecteur, c’est ce détachement dont fait preuve Meursault, cette franchise désarmante lorsqu’il explique pourquoi il n’est pas affecté par la mort de sa mère, pourquoi il n’a ni versé de larmes, ni souhaité la voir une dernière fois.
Meursault met un point d’honneur à dire la vérité en toutes circonstances, sauf quand cela l’ennuie et le fatigue d’avance. Il n’hésite pas à dire à Marie qu’il ne l’aime pas mais que si elle le veut, il l’épousera. Il révèlera la vérité à la Cour, à savoir qu’il a tiré à cause du soleil, sans se soucier des rires que cela engendre ni des conséquences que ces déclarations auront.
La deuxième partie du roman rappelle Le dernier jour d’un condamné de Victor Hugo, à la différence que dans ce dernier, on ne nous dit jamais si l’accusé est coupable ou non. Chez Camus, Meursault est bien coupable du meurtre, mais fait preuve d’une extrême passivité, d’une résignation qui fait mal au cœur.
Le lecteur assiste impuissant à cette parodie de procès pendant laquelle tout semble fait pour que Meursault soit condamné à mort. Son crime est à peine évoqué et semble, aux yeux de la Cour, la simple conséquence de l’indifférence dont il a fait preuve face au décès de sa mère. Meursault est en effet condamné pour n’avoir pas revêtu l’attitude adéquate lors de l’enterrement de sa mère et est donc déclaré comme sans humanité et inapte à vivre en société.
J’ai ressenti énormément de colère durant la deuxième partie du roman (tout comme ce fut le cas lorsque j’ai lu Le dernier jour d’un condamné) et beaucoup de compassion pour Meursault qui apparaît véritablement désarmé dans ce monde qui lui est étranger et qui ne le comprend pas.
Une première découverte de Camus ma foi très convaincante ! Un livre qui ne laisse pas indifférent et marque durablement les esprits. Une réussite !
Les avis des autres participantes : Liyah, Setsuka, Cess, Djak