Contes de la fée verte
Poppy Z. Brite
Première publication en 1993
265 pages
Quatrième de couverture :
Que se passe-t-il lorsque deux frère siamois séparés à la naissance n’ont qu’un seul souhait : redevenir un ? Quand chaque apparition d’un chanteur de rock s’accompagne d’un drame ? Quand un entrepreneur de pompes funèbres du quartier de Chinatown vous charge de surveiller un cadavre ? Et quand vous vous perdez dans Calcutta livrée aux morts-vivants ?
Tout le talent de Poppy Z. Brite se dévoile dans ces douze nouvelles à l’odeur de souffre et au goût d’absinthe, dont « Calcutta, seigneur des nerfs », récompensé par le grand Prix de l’Imaginaire de 1998.
« Je pense que vous devriez lire Poppy Z. Brite. C’est un écrivain au talent immense et au potentiel incroyable. »
Dan Simmon
Quand Livraddict a proposé ce partenariat avec les éditions Folio, je n’ai pu m’empêcher de me jeter dessus. Poppy Z. Brite est l’une des auteurs qui m’a le plus marquée et fascinée lorsque j’étais adolescente, de par la violence de ses livres et leur force. J’ai commencé ma découverte avec la lecture d’Ames perdues, un roman que j’ai dû relire des dizaines de fois depuis et dont je connais encore certains passages par cœur. Depuis, j’ai lu quelques autres de ses titres comme Le corps exquis et Sang d’encre sans jamais réussir à retrouver l’engouement qu’avait suscité Ames perdues. Certes, la plume est toujours la même, la fascination également, mais il me manquait quelque chose. Mais revenons-en à ce qui nous intéresse, autrement dit aux Contes de la fée verte.
Ce recueil nous présente douze nouvelles, bien différentes les unes des autres mais qui présentent tout de même un certain nombre de traits commun, à commencer par leur caractère glauque. Car l’écriture de Poppy Z. Brite est bien particulière et dérangeante pour le lecteur non averti. Le langage est bien souvent cru, violent, frappant, perturbant. Le lecteur est entraîné de New York jusqu’à Calcutta, en passant bien entendu par la Nouvelle Orléans – lieu fétiche de l’auteur dans lequel se passent un grand nombre de ses romans -.
S’il y a une chose qu’il faut concéder à Poppy Z. Brite, c’est l’originalité de ses textes. On croise en effet dans ce recueil des frères siamois séparés à la naissance et n’aspirant qu’à la réunion de leurs deux corps, un fantôme qui devient ami avec une strip-teaseuse, un jeune prodige dont la voix provoque ravages sur ravages, une déesse cruelle et sanguinaire, des zombies carnivores, des pilleurs de tombe désœuvrés et blasés par la vie…
Toutes les nouvelles ne sont pas égales, certaines m’ont beaucoup plus séduites que d’autres. Mais malgré tout, aucune ne m’a laissé indifférente et c’est déjà beaucoup ! J’ai particulièrement aimé retrouver deux des personnages d’Ames perdues, Ghost et Steve le temps de quelques pages, même si leurs personnalités ne sont pas très développées dans les deux nouvelles qui leur sont consacrées.
Poppy Z. Brite excelle dans l’art des descriptions et le prouve une nouvelle fois en réussissant à merveille à recréer l’ambiance étouffante, festive, dangereuse et pourtant fascinante de la Nouvelle Orléans. Et que dire de Calcutta ? Tout y est, la moiteur, la chaleur écrasante, les odeurs d’épices et de décomposition… On s’y croirait. Et comme dans tout roman de Poppy Z. Brite, la fascination s’en mêle et nous empêche de rester indifférent. Et pourtant, la plume est tellement violente et crue qu’on a parfois envie de lâcher le livre quelques minutes le temps de reprendre notre souffle et de récupérer.
Ce qui étonne toujours, c’est l’étroitesse du lien entre la sensualité, voire l’érotisme et la mort. Mort qui est d’ailleurs au cœur des nouvelles, sous différentes formes, mais toujours aussi fascinante malgré son caractère hautement dérangeant. L’un des passages les plus frappants à ce titre est le récit cauchemardesque de cette jeune fille qui, en se rendant sur la tombe de son amour perdu, bascule dans le cercueil et se retrouve corps contre corps avec un cadavre en décomposition. J’en ai encore des frissons et des hauts le cœur.
Ce qui est également remarquable, c’est qu’au fil des nouvelles, on en arrive à redouter ce qui va arriver aux personnages. Car le récit finit toujours par basculer dans l’horreur et le cauchemars, qu’importe la façon dont la nouvelle ait commencé. Et c’est précisément le moment où tout va basculer que l’on se met à angoisser, tout en l’attendant avec une sorte de fascination morbide.
Malgré toute la violence des textes, la poésie n’est pas absente et encore une fois, la beauté des phrases de Poppy Z. Brite m’a touchée, par sa crudité parfois, mais surtout par cet incroyable talent descriptif qui fait que l’on se met à voir, sentir et entendre ce qui est écrit.
Pour terminer ce billet, je tiens à remercier chaudement les éditions Folio et Livraddict pour ce sublime partenariat qui m’aura permis de retomber sous le charme de la plume de Poppy Z. Brite. Ce fut un moment de lecture particulièrement intense. Un coup de coeur !