Le joueur d’échecs
Stefan Zweig
Première publication en 1943
116 pages
Quatrième de couverture :
Prisonnier des nazis, Monsieur B., en dérobant un manuel d'échecs, a pu, à travers ce qui est devenu littéralement une folle passion, découvrir le moyen d'échapper à ses bourreaux. Libéré, il se retrouve plus tard sur un bateau où il est amené à disputer une ultime partie contre le champion Czentovic. Une partie à la fois envoûtante et dérisoire...
Quand ce texte paraît à Stockholm en 1943, Stefan Zweig, désespéré par la montée et les victoires du nazisme, s'est donné la mort l'année précédente au Brésil, en compagnie de sa femme. La catastrophe des années quarante lui apparaissait comme la négation de tout son travail d'homme et d'écrivain. Le joueur d'échecs est une confession à peine déguisée de cette désespérance.
Voilà quelques mois que j’entendais parler de cet auteur sans m’être jamais décidée à le découvrir, jusqu’au jour où j’ai trouvé un nombre impressionnant de ces livres cachés sur un rayon de bibliothèque. Après avoir survolé les quatrièmes de couverture, je me suis décidée pour celui-ci. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que j’ai été séduite !
Cette nouvelle envoûtante se lit d’une traite. Zweig nous emmène avec brio jusqu’aux frontières entre le rêve et la réalité, entre l’équilibre et la folie, la résignation et l’espoir.
Les parties d’échec – car elles sont bel et bien le fil conducteur de ce roman – ne sont au début que le prétexte à une genèse des personnages, à une narration de leur passé, de leur évolution. La psychologie des personnages est extrêmement fouillée et complexe pour mon plus grand bonheur, et c’est justement par ces fréquents retours en arrière que nous parvenons à comprendre l’état d’esprit et le comportement des adversaires, et notamment M.B. et Czentovic.
La première partie de la nouvelle explique l’ascension fulgurante d’un jeune homme peu intelligent et somme toute fort banal grâce aux échecs. De l’autre côté, Zweig nous dépeint le passé sombre et rempli de désespoir de M.B., emprisonné par les nazis et enfermé pendant de longues semaines sans aucune distraction ni visite. Son seul moyen pour éviter de basculer dans la folie ? Jouer d’interminables et ininterrompues parties d’échec virtuelles contre lui-même. Oui mais rapidement, réalité et folie se rejoignent et M.B. sombre dans un univers rempli de cases noirs et blanches.
La partie qui nous est narrée à la fin de la nouvelle et qui oppose Czentovic et M.B. est l’occasion pour M.B. de se prouver qu’il n’a pas perdu la raison, que les échecs lui ont permis de survivre à la torture nazie. Une bouée de sauvetage certes, mais qui se transforme rapidement en prison, en écrin abritant une folie qui n’attend qu’une rechute pour réapparaître.
Une nouvelle magnifique, poignante et écrite dans un style très frappant.