La grammaire est une chanson douce
Erik Orsenna
Publié en 2001
136 pages
D'autres titres :
Les Chevaliers du Subjonctif
Quatrième de couverture :
"Elle était là, immobile sur son lit, la petite phrase bien connue, trop connue : Je t’aime.
Trois mots maigres et pâles, si pâles. Les sept lettres ressortaient à peine sur la blancheur des draps.
Il me sembla qu’elle nous souriait, la petite phrase.
Il me sembla qu’elle nous parlait :
- Je suis un peu fatiguée. Il paraît que j’ai trop travaillé. Il faut que je me repose.
- Allons, allons, Je t’aime, lui répondit Monsieur Henri, je te connais. Depuis le temps que tu existes. Tu es solide. Quelques jours de repos et tu seras sur pied.
Monsieur Henri était aussi bouleversé que moi.
Tout le monde dit et répète « Je t’aime ». Il faut faire attention aux mots. Ne pas les répéter à tout bout de champ. Ni les employer à tort et à travers, les uns pour les autres, en racontant des mensonges. Autrement, les mots s’usent. Et parfois, il est trop tard pour les sauver."
Construit à la manière d’un conte poétique, ce petit livre est un éloge de la langue française, un véritable appel à reconsidérer la grammaire non comme une obligation rébarbative mais comme une chose ludique et agréable.
J’ai été séduite par l’histoire, certes enfantine et parfois maladroitement amenée, mais toujours touchante. Et j’ai beaucoup aimé la façon qu’a l’auteur de personnifier les mots, d’en faire des personnes à part entière, avec des sentiments et des désirs de liberté et, grâce à ses habiles métaphores, de réexpliquer les composantes d’une phrase de façon ludique.
J’ai sourit en lisant la critique de l’analyse littéraire froide qui dissèque véritablement les mots que j’ai tout de même trouvé extrême (même lorsque nous faisions de l’analyse de textes pure et dure je ne me souviens pas avoir trouvé des termes aussi… scientifiques et vides de sens !). Un passage m’a notamment interpellée : « Le matin, on nous apprenait à découper la langue française en morceaux. Et l’après-midi, on nous apprenait à dessécher ces morceaux découpés le matin, à retirer tout leur sang, tout le suc, les muscles et la chair. »
Orsenna appelle au contraire à aimer la langue française, à choyer les mots que nous utilisons et empêcher la disparition de certains autres. Il revendique l’extrême richesse de notre langue et on se prend l’envie d’apprendre de nouveaux mots, juste pour le plaisir de les prononcer.
La vision de la langue française est tout de même très enfantine, et ce livre est à mon sens plus un livre pour les enfants d’une dizaine d’année que pour les adultes.
En bref une lecture agréable qui m’aurait sûrement plus séduite il y a quelques années de cela.