Les lectures de Nymi

Lundi 23 mai 2011 à 11:36

Lorsque j’étais une œuvre d’art

Eric-Emmanuel Schmitt

 

Première publication en 2002

253 pages


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Résumé :

 

          Parce qu’il se sent médiocre et inexistant, un jeune homme va se suicider quand un artiste mégalomane suspend son geste. Il lui propose d’acheter son âme et son corps pour en faire une sculpture vivante, sublime ou monstrueuse, et une marchandise planétaire. Le désespéré accepte le pacte et l’opération, se laisse déshumaniser, et exposer aux yeux des foules, sous le nom d’Adam-bis. Mais peut-il abdiquer entièrement son humanité ? Grâce à l’amour d’une jeune-femme, « l’œuvre d’art » tente alors de sortir de l’emprise de son créateur et de retrouver sa conscience perdue. Cette fable excentrique, inquiétante et comique nous entraîne dans un monde rongé par le narcissisme, le culte du simulacre et de l’apparence, le totalitarisme de l’image : le nôtre.

 

 

 

            

          
Après plus d’un mois et demi d’absence – oui, les partiels m’ont mené la vie dure – je reviens mettre à jour mon pauvre blog délaissé. Je suis enfin en vacances et je compte bien rattraper mon retard dans mes publications ainsi que dans mes livres à lire ! Mais revenons-en au livre qui donne lieu à cet article : Lorsque j’étais une œuvre d’art.   

 

Une nouvelle fois, Eric-Emmanuel Schmitt a su me transporter bien loin de tous mes repères, sans en avoir l’air. Il nous présente ici un personnage banal de son propre point de vue, souffrant de la célébrité et de la très grande beauté de ses frères jumeaux. Déterminé à mourir, il décide pourtant de se remettre entre les mains du célèbre artiste Zeus Peter-Lama afin que celui-ci fasse de lui une œuvre d’art vivante, révolutionnaire et unique. Mais le rêve tourne bientôt en cauchemars lorsqu’Adam-bis – renommé par son créateur – commence à manifester quelques regains de conscience et qu’il s’oppose à son désormais maître.

 

            Durant toute ma lecture, une pensée n’a cessée de tourner dans ma tête, « pourvu que ça n’arrive jamais ! ». Le lecteur assiste en effet impuissant à l’ascension éphémère du héros, ascension fulgurante mais qui comporte tout de même un prix : céder son âme et s’oublier entre les mains de son créateur. Dépossédé de lui-même, déshumanisé, réduit à un simple objet de curiosité, Adam-bis émeut et agace tour à tour par son aveuglement. Zeus-Peter Lama, lui, ne provoque que répulsion et colère. Sa vanité et sa condescendance en font un personnage détestable, haïssable même auquel on ne souhaite finalement qu’une chute lente et douloureuse, à l’image de celle qu’il fait subir à Adam.

 

            L’ambiance est pesante, sombre et bien souvent révoltante. L’attitude des politiques, des médias et même celle du public choque par et insupporte à la fois. Adam-bis est en effet bien devenu une œuvre d’art, perdant dès lors son statut d’homme ainsi que les droits qui vont avec.

 

            Le style est toujours aussi agréable, aussi riche et poétique. Le premier chapitre m’a particulièrement marquée et j’en ai savouré chaque phrase. Ma seule déception ira à la fin du roman. J’ai en effet était très surprise de la manière dont Schmitt conclue tant de désillusions et d’épreuves. Un peu déçue à la vérité, ce qui est dommage puisque lorsque la fin d’un roman ne me plaît pas, mon impression générale de celui-ci a tendance à diminuer.

 

            En bref, une lecture très agréable et un coup de maître d’Eric-Emmanuel Schmitt. Un seul bémol : la fin un peu too much à mon goût.

Mercredi 22 février 2012 à 11:09

 1984 
George Orwell
Première publication en 1949
374 pages

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Du même auteur : 
La ferme des animaux


Quatrième de couverture :
   De tous les carrefours importants, le visage à moustache noire vous fixait du regard. Il y en avait un sur le mur d'en face.
   BIG BROTHER VOUS REGARDE, répétait la légende, tandis que le regard des yeux noirs pénétrait les yeux de Winston... Au loin, un hélicoptère glissa entre les toits, plana un moment, telle une mouche bleue, puis repartit comme une flèche, dans un vol courbe. C'était une patrouille qui venait mettre le nez aux fenêtres des gens.
   Mais les patrouilles n'avaient pas d'importance.
   Seule comptait la Police de la Pensée.





              Après une très – trop – longue pause dans mes lectures « plaisir », imputable à la fac et à ma frustration de savoir que je n’ai pas le temps de lire un livre aussi vite que je le voudrais, la tentation d’ouvrir un livre qui m’attirait a été trop grande. C’est entre le ravissement de retrouver mes moments de lecture et la culpabilité de ne pas travailler que j’ai commencé 1984. Et comment dire ? La culpabilité n’a pas fait long feu face à mon besoin dévorant de poursuivre ma lecture.

L’histoire se déroule à Londres, après qu’une guerre nucléaire ait séparé le monde en trois grands blocs : l’Eurasia, l’Estasia et enfin l’Océania. Ces puissances sont en guerre perpétuelle et les changements d’alliés et d’ennemis sont fréquents. Chaque bloc est dirigé par un groupe totalitaire, revendiqués comme étant différents les uns des autres, mais finalement bien similaires. Le crime par excellence est celui de penser et sitôt accompli, avant même que des actes ne suivent les pensées des sujets, ceux-ci sont vaporisés et dès lors, n’existent plus, que ce soit dans le passé (tout document comportant leur nom est falsifié) ou dans le présent (les gens oublient consciemment son existence).

Nous suivons Winston Smith, employé du Parti extérieur, autrement dit membre de la caste intermédiaire, ni privilégié, ni ramené au rang d’animal, comme le sont les prolétaires. Son travail consiste à falsifier les documents qui lui sont envoyés afin que ceux-ci correspondent à ce que le Parti (Angsoc) déclare vrai. Le passé est ainsi activement réécrit et les gens sont conditionnés à croire ce qu’on leur affirme comme étant vrai, quand bien même il est évident que cela ne peut être. L’amnésie sélective est pratiquée inconsciemment par chaque citoyen, sauf Winston qui ne parvient pas à adhérer aux mensonges du parti et développe peu à peu des sentiments de haine çà son encontre.

Le monde créé par Orwell, fortement inspiré des régimes totalitaires du XXème siècle, est effrayant car tout au long du livre, on sent qu’entre la réalité et la fiction il n’y a qu’un pas - qu’il est aisé de franchir. Les idées politiques sont poussées le plus loin qu’elles peuvent l’être et les personnages sont constamment malmenés, qu’ils en soient conscients ou non. Et c’est ça le pire à mon sens, c’est que les habitants de l’Océania sont tellement conditionnés qu’ils ne réfléchissent plus et son incapables de la moindre logique, de la moindre rébellion. Les seuls suffisamment clairvoyants pour faire face à toutes les absurdités qui leur sont débitées sont torturés et mis à mort.

Dès les premières pages un malaise durable s’installe et une révolte sourde gronde du début à la fin. Chaque page ou presque possède en effet son stock de phrases chocs, d’affirmations qu’on voudrait contredire et de personnage qu’on désirerait forcer à ouvrir les yeux.

Les personnages ne sont pas attachants à proprement parler, mais ils serrent le cœur et on ne peut s’empêcher de s’inquiéter du début à la fin pour Winston. La troisième partie du roman est la plus percutante, la plus cruelle aussi mais surtout, la plus superbement menée.

J’ai terminé ma lecture avec une boule au ventre et une angoisse tenace. Je ne saurai pas dire grand chose de plus, si ce n’est que ce roman m’a profondément remuée et qu’il me laisse une certaine amertume, comme si la noirceur de la nature humaine m’avait soudainement sautée aux yeux. Sombre, percutant, poignant, réaliste et très bien mené, avec un style incisif et sans concession. A découvrir !

 

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